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Entre deux mondes : L’enfance juive dans un Liban en mutation




Publié par La Rédaction le 17 Mai 2023

Un voyage à travers une époque de bouleversements politiques, culturels et personnels. Jacques Neriah, dans "Le Libanais" paru chez VA Éditions, nous emmène dans le Liban des années 1950 où sa famille juive naviguait entre une identité ashkénaze et sépharade. Son parcours démontre comment les pressions sociopolitiques ont forgé son destin, le menant vers une vie nouvelle en Israël. Une histoire aussi personnelle qu'universelle, à la croisée des chemins de l'histoire.



Comment votre famille, étant à la fois ashkénaze et sépharade, a-t-elle été reçue au Liban, un pays majoritairement arabe et musulman ? Quelles sont les particularités culturelles que cette dualité a apportées à votre enfance et comment ont-elles influencé votre vision du monde ?

L’accueil par la population musulmane ou chrétienne n’était pas assez sophistiqué pour faire la différence entre Sépharades et Ashkénazes. Pour les Libanais nous étions Juifs et identifiés avec l’ennemi Israël. Pour la communauté juive, nous étions une espèce inconnue. De plus nous ne participions pas à la vie communautaire ce qui faisait de nous des parias.

Pouvez-vous nous en dire plus sur la transition du Liban d’une « démocratie éclairée », comme vous l’avez décrite, vers un nationalisme plus restrictif ? Quels événements spécifiques ont marqué cette évolution ?

Le Liban politique était basé sur une distribution des positions clés acceptées en 1943. Les musulmans avaient toujours considéré cette distribution injuste et demandaient sans cesse de changer les paramètres. Ainsi le Liban fut dans les années 50 la proie du Nassérisme qui provoqua une première guerre civile en 1958. Ensuite ce furent les Palestiniens chassés de Jordanie qui changèrent la donne dans les années 70 et finalement les Syriens envahirent le Liban en 1976 et y demeurèrent pendant 30 ans. Le Liban bascula dans le giron arabe et son attitude modérée envers les minorités, surtout la communauté juive, se transforma et poussa les Juifs à quitter le pays des 1958.

Comment les Lazaristes, une institution catholique, ont-ils eu un impact sur votre vie, en tant que juif vivant dans un pays musulman en pleine transition politique ?

Les lazaristes chez qui j’ai passé plus de onze ans ont en fait formé ma personnalité, mes habitudes, ma façon de réfléchir, mon esprit d’ouverture envers le différent, la sobriété, l’élitisme en même temps qu’une modestie acceptée. Les lazaristes dans leur système d’éducation me permirent de franchir les échelons et de me préparer à faire face aux défis de la vie. Ce que je garde le plus, c’est la poussée de mes professeurs vers mon destin : Israël, la terre de mes ancêtres que je devais rejoindre coute que coute.

Pouvez-vous parler de l’influence de la pression exercée par les autorités libanaises sur votre décision de partir pour Israël ? Quels ont été les facteurs déterminants qui ont finalement conduit à votre exil ?

Au fur et à mesure des années je pris conscience de mon judaïsme qui me rendait étranger dans mon propre pays. Je devais subir les commentaires empoisonnés contre ma religion, assumer la responsabilité de la crucifixion de Jésus, et être rejeté des rangs de mes collègues pour les entrainements militaires de base parce que juif. Très rapidement j’avais compris que le Liban n’était en fait qu’une terre de passage que je devais quitter au plus vite.


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