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Venezuela : après les frappes américaines, la démission de l’amiral Alvin Holsey




Publié par Aurélie GIRAUD le 17 Octobre 2025

Au Venezuela, les frappes américaines menées depuis le début de septembre ont provoqué un séisme politique et militaire à Washington. L’amiral Alvin Holsey, chef du commandement des forces américaines pour l’Amérique latine, a annoncé sa retraite anticipée après trente-sept ans de service. Cette décision inattendue, survenue dans le sillage de la mort de plusieurs pêcheurs vénézuéliens, révèle les fractures croissantes au sein du haut commandement des États-Unis.



Une démission sur fond de tensions régionales

Venezuela : après les frappes américaines, la démission de l’amiral Alvin Holsey

Le 16 octobre 2025, le Pentagone a confirmé la démission de l’amiral Alvin Holsey, commandant du U.S. Southern Command (SOUTHCOM), structure en charge des opérations américaines en Amérique latine. « Prendre sa retraite de la Marine », a déclaré le haut gradé sur X, sans évoquer de raisons précises à son départ précipité, selon TVA Nouvelles. En poste depuis novembre 2024, il était responsable des frappes menées au large du Venezuela depuis le début du mois de septembre.

Ces opérations, officiellement décrites comme des interventions contre des réseaux de narcotrafic, ont entraîné la mort d’au moins 27 personnes selon L’Express. Washington a reconnu 5 frappes au total. Parmi les victimes figurent 11 marins tués lors d’un bombardement du 2 septembre contre un bateau suspecté de contrebande, au large des côtes vénézuéliennes. Cet incident, confirmé par plusieurs agences internationales, a provoqué une indignation immédiate à Caracas.

Les autorités vénézuéliennes ont dénoncé un « acte de guerre ». Pour les États-Unis, il s’agissait d’une réponse à une intensification du trafic maritime de cocaïne dans la mer des Caraïbes. Mais derrière cette justification officielle se cache un bras de fer politique qui dépasse largement la lutte antidrogue.


Trump relance la ligne dure contre Caracas

Depuis son retour à la Maison-Blanche en janvier, Donald Trump a renoué avec une politique d’affrontement direct face au Venezuela de Nicolás Maduro. Dès la mi-octobre, il a confirmé avoir « autorisé la CIA à mener des opérations clandestines » dans le pays, selon Reuters. Cette décision, qui rappelle les méthodes de la Guerre froide, visait à intensifier la pression sur Caracas, alors que Washington maintient une récompense de 50 millions de dollars pour toute information conduisant à l’arrestation du président vénézuélien.

« Ils ont vidé leurs prisons vers les États-Unis », a affirmé Donald Trump lors d’une allocution rapportée par Reuters, dans une nouvelle tentative de relier Caracas à la criminalité transfrontalière. Le ton est donné : la diplomatie américaine reprend un langage de confrontation directe, soutenu par un appareil militaire désormais engagé dans des frappes dites « préventives ».

Dans ce contexte, la démission de l'amiral Holsey apparaît comme un signal d’alarme. Selon L’Express, plusieurs sources internes ont évoqué des désaccords stratégiques entre Holsey et le secrétaire à la Défense par intérim, Pete Hegseth. Ce dernier, proche du cercle trumpiste, aurait souhaité accélérer les opérations contre les cibles maritimes vénézuéliennes, malgré les pertes civiles. « Pete Hegseth avait des divergences croissantes avec Holsey et voulait qu’il parte », rapporte Le Washington Post, cité par L’Express.


Des divisions profondes au sein de l’armée américaine

Au-delà de l’épisode personnel, la démission d’Alvin Holsey révèle des tensions plus larges au sein des forces armées des États-Unis. Depuis plusieurs mois, le président Trump mène une vaste réorganisation du haut commandement, écartant les officiers jugés trop prudents. L’Express rappelle qu’il a déjà démis plusieurs responsables militaires en désaccord avec sa ligne politique. Cette « purge silencieuse » illustre la volonté du pouvoir civil de reprendre la main sur une institution souvent perçue comme réticente à toute escalade régionale.

Le SOUTHCOM reste pourtant un pivot stratégique essentiel dans la doctrine américaine. Sa mission consiste à sécuriser les voies maritimes d’Amérique latine et à coordonner la lutte contre les trafics. Le 11 octobre, le Pentagone a annoncé la création d’une nouvelle task force de lutte antidrogue, dirigée par le II Marine Expeditionary Force, pour renforcer les opérations dans les Caraïbes, explique Reuters. Cette montée en puissance vise explicitement à accroître la pression sur le Venezuela, présenté comme un acteur clé du narcotrafic régional par Washington.

Mais cette stratégie se heurte à des limites opérationnelles. Plusieurs analystes estiment que les frappes récentes ont affaibli la crédibilité américaine auprès de ses alliés sud-américains. Le Brésil et la Colombie ont exprimé, en privé, leurs inquiétudes quant au risque d’incident maritime majeur. De son côté, Caracas continue de mobiliser la rhétorique souverainiste, accusant les États-Unis de violer les eaux territoriales vénézuéliennes.


Entre contrôle politique et incertitude militaire

L’amiral Alvin Holsey, âgé de soixante ans, avait pris la tête du SOUTHCOM le 7 novembre 2024, succédant à la générale Laura Richardson. Officier respecté, il incarnait une ligne de conduite mesurée, privilégiant la coopération régionale et la diplomatie militaire. Sa retraite, prévue pour le 12 décembre, met fin à 37 années de service.

Les prochains mois s’annoncent décisifs pour la stratégie américaine dans la région. Le Pentagone doit désormais désigner un successeur capable de maintenir l’équilibre entre fermeté politique et maîtrise opérationnelle. Mais la défiance croissante entre le pouvoir exécutif et les états-majors pourrait fragiliser la cohérence de l’action militaire. D’autant que les frappes au large du Venezuela ont déjà coûté la vie à au moins 27 civils et pêcheurs, selon plusieurs bilans convergents.

L’épisode illustre la difficulté pour les États-Unis de concilier la rhétorique de la lutte antidrogue et la réalité d’une confrontation politique régionale. La démission d’Alvin Holsey, survenue au plus fort des opérations, apparaît ainsi comme le symptôme d’un désaccord stratégique plus profond : entre ceux qui prônent la dissuasion et ceux qui préfèrent la démonstration de force.




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