Un projet stratégique au cœur de la souveraineté spatiale française
Premier système du genre en Europe, le radar Aurore symbolise la montée en puissance de la France dans le domaine de la surveillance de l’espace. Selon la DGA, il s’agit d’un « moyen de souveraineté » permettant de détecter et d’analyser la trajectoire des satellites étrangers comme des débris spatiaux susceptibles de menacer les actifs français. Aurore prendra le relais du système GRAVES, limité à environ 1 000 km d’altitude, pour offrir une couverture doublée, garantissant une observation permanente de l’orbite basse.
Le radar sera développé et produit par Thales, sur son site de Limours, en Essonne, un centre d’expertise reconnu pour ses systèmes de détection et de commandement. L’industriel y mobilisera ses équipes spécialisées en traitement radar et en intelligence artificielle afin d’assurer le suivi simultané de plusieurs milliers d’objets spatiaux. « Avec Aurore, radar unique en Europe, Thales contribue à la souveraineté française en renforçant les capacités de surveillance de la situation spatiale », a déclaré Patrice Caine, PDG du groupe, dans un communiqué du 28 octobre 2025.
Un saut technologique majeur pour la défense et l’économie spatiale
D’un point de vue technique, Aurore se distingue par son architecture entièrement logicielle, fonctionnant en bande UHF, et par sa capacité à générer une image haute résolution de la situation spatiale en temps réel. Ce radar « nouvelle génération » disposera d’un temps de réactivité très court, élément clé pour anticiper d’éventuelles manœuvres hostiles ou des collisions en orbite. La DGA souligne que Aurore permettra d’identifier rapidement les comportements anormaux des satellites d’écoute ou d’observation étrangers.
Thales présente le projet comme une avancée de rupture. Le groupe estime qu'Aurore positionnera la France au premier rang européen dans le domaine de la connaissance de la situation spatiale (SSA). Le radar contribuera aussi à la résilience du segment civil, notamment pour la protection des constellations de télécommunication et d’observation. « Dans le cadre de la militarisation croissante de l’espace, cette décision constitue un jalon important pour la souveraineté française et européenne », indique Thales.
Selon la DGA, l’entrée en service du système est prévue à l’horizon 2030, soit une décennie après les premières études préliminaires menées dans le cadre du programme ARES. Si le montant du contrat n'a pas été rendu public, la commande s’inscrit dans la loi de programmation militaire 2024-2030, dotée de 413 milliards d’euros, dont une part importante est consacrée à la modernisation des capacités spatiales.
Un enjeu stratégique face à la militarisation de l’orbite basse
L’annonce d'Aurore intervient dans un contexte international de fortes tensions autour de la surveillance spatiale. Les États-Unis, la Chine et la Russie disposent déjà de réseaux capables de suivre les satellites depuis le sol. Le dispositif permettra à Paris d’identifier plus rapidement les comportements agressifs ou d’espionnage en orbite basse.
Pour la DGA, Aurore représente une réponse concrète à l’évolution des menaces. « Moyen de souveraineté, il permettra de connaître la trajectoire des satellites d’observation ou d’écoute étrangers et d’anticiper la menace des débris spatiaux pour les satellites français », a précisé la direction dans une déclaration officielle. En pratique, le radar offrira une surveillance permanente jusqu’à 2 000 km, tout en permettant de suivre simultanément plusieurs milliers d’objets. Son architecture logicielle évolutive assurera la pérennité du système sur plusieurs décennies.
Le radar sera intégré au commandement de l’espace (CDE), basé à Toulouse, afin de centraliser les données issues de l’observation orbitale et de les fusionner avec celles des partenaires européens. Cette interopérabilité renforcera la capacité de réponse face à toute tentative de brouillage, de désorbitation ou de destruction intentionnelle d’un satellite.

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