Enderi

Accueil
Envoyer à un ami
Version imprimable


L’affaire Uber et Waymo, ou comment ces géants de la Tech grillent les feux rouges pour gagner la course à la voiture autonome




le 5 Juin 2023

Le procès opposant Uber et Waymo, filiale de Google, en février 2018 a encore une fois révélé la compétition féroce que se livrent les géants californiens de la Tech pour être à la pointe de l’innovation. Cette rivalité mène ces entreprises à des stratagèmes complexes pour recruter les ingénieurs stars de la concurrence, et avec eux leurs secrets industriels les plus précieux…



Comment l’ingénieur Anthony Levandowski se retrouva au milieu d’un conflit entre deux géants de la Tech ?

L’affaire Uber et Waymo, ou comment ces géants de la Tech grillent les feux rouges pour gagner la course à la voiture autonome
Anthony Levandowski, ingénieur franco-américain, travailla dans un premier temps comme ingénieur chez Waymo, filiale de Google/Alphabet spécialisée dans le développement de la voiture autonome. Il quitta son poste en janvier 2016 et créa sa propre entreprise de voitures autonomes, nommé Otto, avec un autre ancien ingénieur de chez Waymo, Lior Ron.

Cette entreprise fut ensuite rachetée par Uber en août 2016, soit seulement huit mois plus tard, pour un montant de 680 millions de dollars. Anthony Levandowski occupa dès ce rachat un poste majeur dans le développement de la voiture autonome chez Uber.

Waymo adressa ensuite une plainte auprès de la cour fédérale du district de Californie du Nord pour vol de technologies. La filiale de Google accusa en effet Anthony Levandowski d’avoir téléchargé et ainsi volé 14 000 documents internes de Waymo juste avant de quitter l’entreprise. Ces documents comprenaient les nouvelles technologies développées par Waymo pour détecter les mouvements autour de la voiture autonome. Ils auraient ensuite été récupérés par Uber lors du rachat d’Otto quelques mois plus tard. Waymo accusa également Uber d’avoir monté cette opération avec l’ancien ingénieur de Waymo pour récupérer des informations essentielles au développement de la voiture autonome, et prendre ainsi de l’avance sur la concurrence.

Le procès commença en février 2018 et fut suivi avec attention par le secteur automobile et de nombreux observateurs. Un feuilleton judiciaire de plusieurs semaines était alors à prévoir. Cependant, après seulement quatre jours de témoignages, Uber et Waymo trouvèrent un accord pour mettre fin à la procédure judiciaire. Waymo accepta une offre de 244 millions de dollars de Uber. Uber s’engagea également à ne pas intégrer les informations confidentielles de Waymo dans ses modèles de voiture autonome. Malgré l’accord, Uber nia encore les accusations de complot de Waymo dans le départ et le recrutement d’Anthony Levandowski.

En 2020, Anthony Levandowski a été condamné à 18 mois de prison pour avoir volé et révélé les secrets industriels de Waymo à son nouvel employeur. Il doit également verser 757 000 dollars à Google en guise de dédommagement, et une amende de 95 000 dollars. Dans le cadre d’un autre procès avec Waymo, il fut condamné au versement de 179 millions de dollar.
 

Comment le recrutement d’ingénieurs est devenu le meilleur moyen de recollecter des informations pour les start-ups californiennes ?

Que Uber soit coupable ou non d’un complot pour recruter Anthony Levandowski et volé des documents secrets à Waymo, ce genre de pratiques sont monnaie courante dans ces secteurs très compétitifs. Les sommes d’argent en jeu sont en effet immenses, dans la mesure où ces nouvelles technologies seront probablement à l’origine de marchés mondiaux.

Dans ce contexte, les ingénieurs des différentes entreprises font l’objet d’une grande convoitise, non seulement pour leurs compétences précieuses, mais aussi pour les informations qu’ils peuvent légalement apporter à l’entreprise sur l’avancée de la concurrence. Ces ingénieurs deviennent ainsi les ressources principales des entreprises de la Tech.

Pendant le procès, le CEO de Uber de l’époque, Travis Kalanick, avoua qu’il souhaitait recruter Anthony Levandowski bien avant qu’il ne quitte Google, et qu’il racheta Otto pour qu’il puisse enfin travailler au sein de l’entreprise.

De même, de nombreux échanges de mails et de conversations privées d’ingénieurs de Uber ont révélé leur inquiétude quant à l’avancée de Google dans ses projets de voiture autonome. On observe ici que le rachat d’Otto par Uber n’est pas motivé par des raisons purement économiques et financières, mais par une volonté d’intégrer des ingénieurs compétents dans ses effectifs et de mettre la main sur des informations majeures concernant les dernières avancées de la concurrence.

Malgré les clauses de non-divulgation d’informations confidentielles dans les contrats des ingénieurs, la circulation de ces renseignements est assez rapide. En effet, le roulement des effectifs dans ces start-ups californiennes sont rapides. De nombreux employés sont souvent amenés à tenter leurs propres aventures solitaires.

La compétition pour racheter ces « petites » entreprises comprenant des ingénieurs très compétents est dès lors féroces. Cette pratique, au demeurant très lucrative pour ces grands ingénieurs, est devenu un moyen privilégié pour les grandes entreprises californiennes de s’arracher leurs membres les plus expérimentés et innovants.
 



Nouveau commentaire :

ENDERI promeut la liberté d'expression, dans le respect des personnes et des opinions. La rédaction d'ENDERI se réserve le droit de supprimer, sans préavis, tout commentaire à caractère insultant, diffamatoire, péremptoire, ou commercial.