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Hydrogène vert : l’engouement du monde de la finance change la donne




Publié par La Rédaction le 26 Octobre 2022

En lançant un programme de 3 milliards d’euros en faveur de l’hydrogène le 14 septembre dernier, l’Union européenne vient de confirmer l’implication grandissante du monde de la finance : flécher les investissements vers cette filière est un choix d’avenir.



« L’hydrogène peut changer la donne pour l’Europe. Nous devons faire passer notre économie de l’hydrogène du marché de niche au marché de masse. Nous allons créer une Banque européenne de l’hydrogène. Trois milliards d’euros pour aider à construire le futur marché de l’hydrogène » a tweeté Ursula Van Der Leyen, la puissante présidente de la Commission européenne, le 14 septembre dernier. Cette annonce vient s’ajouter à la création, en avril, du Fonds pour l’hydrogène vert (Green Hydrogen Fund), un « fonds fiduciaire qui offre des conseils stratégiques et un renforcement des capacités à des pays en développement pour les aider à se préparer à décarboner leur industrie grâce à l’hydrogène vert », ainsi qu’à la future entrée en vigueur, en 2023, de la taxonomie européenne destinée à flécher les investissements vers les activités décarbonées. Le ton est donné : tous les indicateurs sont au vert, l’avenir européen se conjuguera à l’hydrogène.
 
Des milliards pour la décarbonation de l’économie

Les fonds d’investissement européens, eux, n’ont pas attendu que Bruxelles donne le ‘la’. Plusieurs d’entre eux ont déjà lancé des projets favorisant la filière hydrogène. Et la crise énergétique – aggravée par les répercussions de la guerre en Ukraine et de la bataille autour des matières premières (pétrole, gaz…) – leur donne raison. Tous les grands acteurs de l’industrie énergétique européenne ont engagé la même réflexion. En octobre 2021, plusieurs d’entre eux se sont unis autour du grand projet baptisé Hy24 dont la vocation est de structurer le marché de l’hydrogène décarboné. Parmi eux, Air Liquide, TotalEnergies, Vinci, ADP, mais aussi des banques comme la Société Générale ou le Crédit Agricole. Aux manettes du projet, à parts égales, le groupe suisse FiveT Hydrogen et le fonds de capital-investissement français Ardian se sont fixés, comme premier objectif, de lever 1,5 milliard d’euros courant 2022.
 
Ce projet européen a également attiré des partenaires américains et asiatiques. Car l’hydrogène vert apparaît comme une alternative crédible aux énergies fossiles, dans le contexte mondial de décarbonation des activités humaines qui demandera, selon les chiffres de Bloomberg, un investissement total de 100000 milliards de dollars d’ici 2050. « Nous sommes fiers d’avoir été choisis par les plus grands acteurs industriels et investisseurs au monde pour mener à bien cette initiative, s’est félicité Mathias Burghardt, responsable de l’activité Infrastructure d’Ardian, lors du lancement du projet. À la veille de la COP26, la création et la gestion d’une telle plateforme est une immense responsabilité et une belle ambition. Après avoir soutenu le marché des énergies renouvelables en accompagnant le développement d’une capacité de production de chaleur et d’énergie renouvelable de 7,5 GW, il nous semblait évident que nous devions jouer un rôle pionnier dans l’hydrogène. Nous sommes persuadés que Hy24 saura jouer un rôle déterminant dans l’accélération du déploiement de l’hydrogène nécessaire à la décarbonation de nos économies. » La société de gestion, largement impliquée dans le financement d’entreprises engagées dans le développement durable, n’en est d’ailleurs pas à son coup d’essai. Dans son dernier rapport RSE, la présidente d’Ardian Dominique Senequier soulignait que le « développement durable est fondamental pour notre avenir. En 2021, nous avons franchi des étapes importantes. Nous avons annoncé la création de Hy24, une co-entreprise entre Ardian et FiveT Hydrogen, ainsi que la clôture du fonds Ardian Buyout VII, à 7,5 milliards d’euros ».
 
Des promesses enfin tenues

L’hydrogène vert est donc « bankable » pour les investisseurs. Et c’est tant mieux, car la partie n’était pas gagnée d’avance. Son manque de compétitivité était encore pointé du doigt il y a seulement trois ans. Mais les choses ont changé. En mars dernier, plusieurs acteurs de l’hydrogène se sont également réunis à Paris lors de l’HydrogenTour pour faire le point sur les investissements présents et futurs. À cette occasion, Olivier Mariée, directeur général de la société de gestion d’actifs CPR AM, a présenté sa nouvelle stratégie liée à l’hydrogène : « Cette solution innovante, la première du marché en matière de gestion active d’equity mondiale, va jouer un rôle absolument majeur dans les années qui viennent. Aujourd’hui, nous sommes convaincus que la dynamique est en marche. L’hydrogène a – et aura – un rôle-clé dans la transition énergétique et nous pouvons constater que la situation actuelle va renforcer ce rôle, pour l’avenir de la France, de l’Europe mais plus globalement de la planète. »
 
L’urgence est en effet globale. Et les promesses de la filière hydrogène le sont tout autant, comme le remarque Bertrand Piccard, président de la Fondation Solar Impulse et ambassadeur de bonne volonté des Nations unies pour les technologies propres : « Nous devons passer le plus vite possible du monde du passé, qui est inefficient et polluant, au monde du présent avec des énergies renouvelables et propres. Et pour cela, il y a bien sûr un maillon qui est indispensable : l’hydrogène. Pas seulement pour l’industrie, mais aussi comme stockage des énergies renouvelables. Aujourd’hui, l’hydrogène est fédérateur parce qu’il permet d’associer toute l’industrie, y compris l’industrie pétrolière. C’est aussi une question politique parce que cela assure une partie de l’indépendance énergétique du continent, et c’est bien sûr économiquement rentable, de plus en plus rentable. Donc ça intéresse les investisseurs. »
 
Une filière pour le développement des territoires

Et cet intérêt des investisseurs se confirme, autant à l’échelle continentale comme dans le cas de Hy24, que régionale. En Vendée par exemple, la jeune entreprise Lhyfe, pionnière dans l’hydrogène vert renouvelable, vient de lever 50 millions d’euros grâce au fonds d’investissement Swen Capital Partners et à la Banque des territoires. Le créneau de cette startup : la fabrication d’hydrogène à partir d’énergie éolienne. Comme pour Ardian ou CPR AM, les investisseurs ont répondu présents  : « Nous sommes fiers d’accompagner Lhyfe dans cette levée de fonds d’envergure au travers de notre fonds Swen Impact Fund for Transition et de mettre à profit notre expertise commune sur l’hydrogène renouvelable, commente Olivier Aubert, directeur général de Swen Capital Partners. Nous avons trouvé des interlocuteurs de confiance avec qui nous partageons la volonté de soutenir l’innovation et de proposer des solutions pour le développement d’une industrie décarbonée et l’émergence d’un tissu industriel français créateur d’emplois. »
 
Car la filière hydrogène affiche des promesses auxquelles les décideurs politiques ne sont pas insensibles, en termes d’emplois, de réindustrialisation et donc de souveraineté énergétique. De plus, Matthieu Guesné, le président et fondateur de la startup Lhyfe, n’a pas manqué de souligner ce double intérêt, venant à la fois d’un partenaire privé et d’un partenaire institutionnel : « L’engagement de Swen Capital Partners pour l’environnement démontre que notre solution de production d’un hydrogène écologique est en capacité d’offrir un avenir plus respirable à nos enfants. La Banque des Territoires confirme la robustesse, l’acuité et le potentiel du modèle de Lhyfe en France, pour les industriels et les collectivités. »
 
L’avènement de l’hydrogène vert n’est donc plus qu’une question de temps. Son attractivité pour les investisseurs ne fait plus de doute, et les injonctions de l’Union européenne devraient encore accélérer la tendance. Dans ce contexte porteur, la France aura certainement un rôle majeur à jouer
 


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