En mai 2025, l’International Institute for Strategic Studies (IISS) a publié un rapport détaillant les conséquences d’un retrait américain du continent. L’étude, qui s’appuie sur des scénarios précis, chiffre le coût pour l’Europe et souligne la dépendance stratégique vis-à-vis des États-Unis. Ce document alimente un débat crucial sur l’avenir de la défense européenne.
Chiffrer le coût d’un désengagement américain
Le rapport de l’IISS avance que remplacer les contributions conventionnelles des États-Unis en Europe impliquerait une dépense d’environ 1000 milliards de dollars sur 25 ans. Cette somme inclut l’acquisition de matériels et leur exploitation durant leur cycle de vie complet. L’institut insiste sur le fait que ces projections excluent volontairement les capacités nucléaires et certaines technologies sensibles, ce qui souligne que la facture réelle pourrait être encore plus élevée.
Les estimations partielles confirment l’ampleur du défi. Aux coûts d’acquisition immédiats, s’ajoutent le besoin de compenser le retrait de 128 000 soldats américains stationnés en Europe, selon les chiffres de BFMTV. L’étude repose sur une hypothèse controversée : la conclusion d’un cessez-le-feu en Ukraine à la mi-2025, qui permettrait un désengagement américain. Mais même en tenant compte de ce postulat, l’impact économique et militaire serait colossal.
Les capacités à combler et les contraintes industrielles
Au-delà des chiffres globaux, le rapport met en évidence les manques critiques qu’entraînerait un retrait. Les États-Unis apportent des capacités de commandement, de renseignement (ISR), de soutien aérien et de ravitaillement en vol qu’il faudrait reconstituer. L’IISS souligne que ces fonctions ne peuvent être développées du jour au lendemain en Europe. Bruegel estime qu’un tel scénario pourrait nécessiter jusqu’à 300 000 soldats supplémentaires et une hausse des budgets européens de 250 milliards d’euros par an. Ces chiffres démontrent que l’effort ne serait pas uniquement financier, mais aussi humain et organisationnel.
La contrainte industrielle pèse lourdement. Selon le Hudson Institute, la capacité des industries européennes à produire rapidement des équipements complexes reste limitée. Certaines chaînes de production, comme pour l’aviation de combat, les systèmes de défense antimissile ou les sous-marins nucléaires d’attaque, nécessitent plusieurs années avant d’atteindre un rythme suffisant. L’IISS insiste d’ailleurs sur le fait que l’Europe, même si elle engageait immédiatement des investissements massifs, ne pourrait pas compenser la supériorité technologique et la profondeur logistique fournies aujourd’hui par les États-Unis.