Le point de bascule serait Taiwan. Si l’île venait à tomber sous le contrôle de la Chine, la configuration stratégique de l’Asie basculerait. La première chaîne d’îles – du Japon aux Philippines – perdrait sa fonction de barrière. La Chine disposerait alors d’une base avancée pour projeter sa puissance dans le Pacifique occidental et menacer directement les alliés des États-Unis.
Face à ce risque, la seule voie pour éviter la guerre est une dissuasion crédible. Celle-ci repose sur quatre piliers : une base industrielle robuste, une avance technologique préservée, des alliances cohérentes et une volonté politique claire.
D’abord, il faut reconstruire une capacité industrielle capable de soutenir des opérations prolongées. Les États-Unis ne disposent plus des chaînes de production nécessaires pour fournir, en cas de conflit, les volumes d’armement exigés. Leur dépendance à des fournisseurs étrangers fragilise toute posture défensive. Reconstituer un tissu industriel de défense, diversifié et réactif, devient une urgence stratégique.
Ensuite, la maîtrise technologique conditionne la crédibilité militaire. Taiwan concentre plus de 60 % de la production mondiale de semi-conducteurs avancés. Une invasion ou un blocus déstabiliserait toute l’économie mondiale : l’intelligence artificielle, la robotique, la défense et les télécommunications en subiraient immédiatement les effets. La préservation et la protection de cette filière sont donc aussi cruciales que la défense du territoire taïwanais lui-même.
La dissuasion exige également une coordination solide avec les alliés asiatiques. Japon, Corée du Sud et Philippines doivent être intégrés dans un dispositif cohérent. Le doute sur la fiabilité du soutien américain pourrait les pousser à chercher des garanties nucléaires indépendantes, ce qui aggraverait les tensions régionales. Une alliance claire, visible et opérationnelle est le meilleur signal de fermeté à adresser à Pékin.
Enfin, la volonté politique doit être ferme et constante. Prévenir la guerre ne se décrète pas, cela se prépare. Il faut des budgets militaires stables, des objectifs définis, et une communication sans ambiguïté. L’inaction ou les demi-mesures encouragent l’agression. La dissuasion repose autant sur les moyens matériels que sur la perception de la détermination à s’en servir.
La prévention d’un conflit ne passe ni par la rhétorique ni par la complaisance. Elle repose sur une posture réaliste : reconnaître la rivalité stratégique, renforcer les capacités nationales et collectives, et maintenir la paix par la force du dissuasif. Une guerre entre grandes puissances serait catastrophique pour l’économie mondiale et pour l’équilibre politique de la planète. Mais l’ignorer, ou croire qu’elle ne peut survenir, serait une erreur plus grave encore.

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