Une époque de ruptures qui ravive l’intérêt pour les penseurs stratégiques
La multiplication des crises depuis la fin des années 2010 a replacé la réflexion stratégique au centre de l’attention. L’invasion de l’Ukraine, les tensions sino-américaines, les conflits au Moyen-Orient ou encore la désorganisation des chaînes logistiques mondiales ont rappelé que la stabilité n’est jamais acquise. Dans un tel contexte, les classiques de la stratégie connaissent un regain spectaculaire d’intérêt. Clausewitz, Sun Tzu, Liddell Hart ou encore Raymond Aron redeviennent des références mobilisées par les cadres, les étudiants, les militaires et les décideurs économiques.
L’essor des ouvrages contemporains sur l’intelligence économique, les nouvelles conflictualités ou la guerre de l’information témoigne également de ce mouvement. Ces lectures permettent de comprendre des mécanismes de puissance, d’influence et de compétition qui structurent désormais les relations internationales. Pour beaucoup, ouvrir un livre de stratégie n’est plus une curiosité intellectuelle mais une manière de donner du sens aux événements qui s’enchaînent.
La stratégie n’est plus réservée aux militaires : elle irrigue économie, technologie et gouvernance
Un autre facteur majeur explique cette résurgence : la stratégie a quitté le seul champ militaire pour irriguer l’ensemble des secteurs. Les entreprises doivent désormais anticiper les ruptures, gérer les risques géopolitiques, sécuriser leurs approvisionnements et se prémunir contre les ingérences étrangères. Dans ce contexte, les ouvrages sur la planification, la gestion de crise ou l’anticipation deviennent des outils de travail pour les directions générales.
L’émergence des guerres informationnelles a élargi encore davantage le public. Les médias, les communicants, les responsables politiques et les ONG se tournent vers des livres décryptant les opérations d’influence, la manipulation de l’opinion ou la compétition cognitive. La stratégie n’est plus un langage spécialisé mais un prisme incontournable pour comprendre un environnement globalisé et instable.
Un besoin croissant de profondeur face au bruit médiatique
Enfin, le retour massif vers les livres de stratégie répond à une fatigue collective face au flux continu d’informations rapides, souvent superficielles. Le public cherche de la profondeur, de l’analyse, des cadres conceptuels solides. Les ouvrages stratégiques offrent ce recul que ne peuvent fournir ni les réseaux sociaux ni les commentaires à chaud.
L’engouement pour ces lectures traduit donc un besoin d’outils intellectuels capables d’éclairer les dynamiques longues, de donner des repères et d’offrir une vision structurée du monde. À l’heure où les conflits se complexifient, où les puissances s’affrontent sur des terrains multiples et où chaque crise semble annoncer la suivante, les livres de stratégie redeviennent des compagnons indispensables pour penser lucidement l’avenir.

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