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Grève chez Boeing : la quatrième offre rejetée, le blocage industriel s’installe




Publié par François Lapierre le 27 Octobre 2025

Le bras de fer se poursuit entre Boeing et les syndicats de machinistes de sa division Défense, Espace et Sécurité. Depuis le 4 août 2025, près de 3 200 ouvriers répartis sur trois sites du Midwest – St. Louis et St. Charles (Missouri) ainsi que Mascoutah (Illinois) – maintiennent leur grève. Le 26 octobre, l’International Association of Machinists and Aerospace Workers (IAM District 837) a rejeté la quatrième proposition de contrat de Boeing, prolongeant un conflit social qui met à l’épreuve la solidité industrielle du groupe.



Boeing tente de désamorcer le conflit par une offre salariale structurée

Dans sa dernière offre, Boeing avait misé sur des augmentations salariales significatives. Selon Reuters, le contrat prévoyait une hausse moyenne de 24 % des salaires sur cinq ans, assortie d’un bonus de ratification de 4 000 dollars (dont 3 000 dollars la première année et 1 000 dollars à la quatrième). L’avionneur proposait également 3 000 dollars en actions restreintes versées sur trois ans, un dispositif rarement appliqué à ce niveau de production industrielle.

Le groupe insistait sur le caractère majeur de l’offre, la qualifiant de “market-leading” dans le secteur. Un porte-parole a toutefois admis que “la valeur globale des termes ne peut plus être augmentée, seulement réallouée”, signe que la marge de manœuvre financière de l’avionneur est désormais contrainte.

Cependant, la structure interne de l’accord a suscité la méfiance des syndicats. L’augmentation automatique liée à l’ancienneté aurait été réduite à 0,25 dollar de l’heure, contre des progressions supérieures dans d’autres divisions. Le plan 401(k) et les contributions retraite demeuraient inchangés, ce que les syndicats jugent “inacceptable après des années de concessions”.

Au-delà du volet salarial, Boeing cherche aussi à préserver la compétitivité de sa division Défense, Espace et Sécurité, qui représente plus d’un tiers du chiffre d’affaires du groupe selon Associated Press. Les usines concernées produisent notamment des F-15EX, des T-7A Red Hawk et divers systèmes électroniques pour le Pentagone. Tout ralentissement pèse donc directement sur la chaîne d’approvisionnement de l’industrie de la défense américaine.

Les syndicats dénoncent une offre déconnectée de la réalité ouvrière

La base syndicale du District 837 a rejeté l’offre de Boeing par 51 % contre 49 %, un résultat serré mais symboliquement lourd. Pour Brian Bryant, président national de l’IAM, ce vote reflète un sentiment profond de désillusion : « Boeing prétend avoir écouté ses salariés ; le résultat du vote prouve le contraire. »

Les machinistes estiment que la proposition ne comble pas le retard accumulé vis-à-vis d’autres sites du groupe. En effet, l’an dernier, les salariés de la région de Seattle avaient obtenu une hausse salariale de 38 % et un bonus de ratification de 12 000 dollars après un accord local. « Nous faisons partie de la même entreprise, mais pas de la même équation économique », confie un délégué local cité par The Guardian.

Le syndicat souligne aussi que le coût de la vie dans le Missouri a progressé de près de 20 % depuis 2020, alors que les salaires, gelés pendant plusieurs années, n’ont pas suivi. Le manque de réévaluation des plans de retraite et de couverture santé est considéré comme une trahison après des décennies de fidélité industrielle. L’IAM accuse l’avionneur de “détourner les fonds vers la rémunération des actionnaires plutôt que vers la stabilisation des ateliers”. Le communiqué publié sur le site officiel du syndicat, le 26 octobre 2025, avertit que “le refus de Boeing de conclure un contrat équitable continue de menacer la préparation militaire américaine”.
L’industrie de la défense sous tension

Cette grève chez Boeing, qui atteint désormais plus de 80 jours, commence à peser lourdement sur la production militaire américaine. Les sites de St. Louis fabriquent des structures d’avions de combat F-15EX, des fuselages pour le T-7A et des pièces pour des drones de surveillance. Selon LiveMint, des retards de livraison ont déjà été constatés sur certaines chaînes, ce qui fragilise la crédibilité industrielle du groupe.

L’impact dépasse la seule entreprise : de nombreux sous-traitants, spécialisés dans la métallurgie et les systèmes embarqués, dépendent de ces usines. Dans une industrie où les marges sont étroites et les cadences cruciales, chaque semaine de grève réduit la capacité à honorer les commandes publiques. Pour les autorités fédérales, la situation illustre la fragilité du modèle de production en cascade adopté par les grands acteurs de l’industrie de défense. Les arrêts prolongés perturbent les livraisons vers Lockheed Martin ou Raytheon, partenaires de Boeing sur plusieurs programmes.

Du côté de Boeing, les dirigeants restent prudents : « Nous sommes déçus du rejet de notre proposition, mais nous demeurons engagés à trouver une issue juste », a indiqué un porte-parole à Associated Press. L’entreprise dit continuer les discussions, sans pour autant revoir à la hausse la valeur totale du contrat.


 



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