Enderi

Accueil
Envoyer à un ami
Version imprimable


Résistant ou terroriste ? Quand les mots décident de la légimité d'une guerre...




Publié par La Rédaction le 23 Décembre 2025

Un même acte peut être glorifié comme héroïque ou condamné comme barbare selon le mot choisi. La sémantique n’est pas un détail : elle détermine qui a “le droit” de se battre et qui devient un ennemi absolu. À l’heure où les conflits asymétriques se multiplient, la frontière entre “résistant”, “insurgé” et “terroriste” n’a jamais été aussi floue, ni aussi politique.



Le pouvoir des mots : ce que l’on nomme, on le définit

Un résistant et un soldat américain dans une ville française - Wikimédia commons
Un résistant et un soldat américain dans une ville française - Wikimédia commons

L’histoire des conflits montre que les mots ne décrivent pas la guerre, ils la classent moralement. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Français qui opposaient une guérilla au régime nazi sont devenus “résistants”, un mot qui porte une charge héroïque, presque sacrée. Dans d’autres contextes, des groupes menant des actions comparables — embuscades, sabotages, attaques ciblées — sont qualifiés de “terroristes”.

La différence n’est pas dans le mode d’action. Elle est dans la légitimité attribuée.
Être “résistant”, c’est se battre contre un occupant ou un régime considéré comme illégitime.
Être “terroriste”, c’est utiliser la violence en dehors de toute légitimité reconnue par un État, une organisation internationale ou l’opinion dominante.

La sémantique devient alors un instrument de pouvoir : elle permet de fixer le cadre moral du conflit avant même qu’il ne soit jugé militairement.


Même tactiques, sens opposés : la guérilla brouille les lignes

Les actions de guérilla — frappes rapides, sabotages, attaques surprise, mobilité extrême — existent depuis l’Antiquité et traversent les siècles. Elles reposent sur l’asymétrie : un groupe faible face à un adversaire puissant.

Sur le terrain, ces tactiques s'apparentent souvent à celles employées par des organisations qualifiées de terroristes. Dans les deux cas, on retrouve l’embuscade, le harcèlement, l’exploitation du terrain, la dispersion, la volonté d’épuiser un adversaire mieux armé.

Ce qui change, ce n’est pas la méthode, mais la cible et le cadre.
Une guérilla visant une armée d’occupation reçoit parfois l’assentiment d’une partie de la population, et finit classée comme “résistance”.
Une guérilla visant des civils ou opérant hors de tout cadre politique stable bascule automatiquement dans la catégorie “terrorisme”.

Les modes d’action se ressemblent. Leur interprétation, non.


Quand les responsables politiques manient dangereusement les mots

Dans ce contexte, la manière dont les dirigeants qualifient, ou refusent de qualifier certains groupes n’est jamais anodine. Refuser d'appeler un groupe terroriste lorsque ses actions correspondent clairement à cette définition internationale exige un argumentaire solide, transparent et rigoureux.

Car ce choix peut être lourd de conséquences. Il peut brouiller la perception publique du conflit. Il peut affaiblir la cohésion nationale dans des moments de tension. Il peut donner l’impression d’une complaisance dangereuse. Il peut même modifier les alliances et créer des tensions diplomatiques majeures.

La sémantique engage des responsabilités politiques. Un mot mal employé peut fracturer une société. Un mot retenu peut envoyer un signal ambigu à des acteurs violents qui exploitent toujours les failles du langage.

Dans les conflits asymétriques, nommer est déjà une forme d’action. Et lorsqu’il s’agit de terrorisme, la prudence ne doit jamais être un prétexte à l’ambiguïté. C’est au contraire une obligation de précision, car un mot peut protéger, ou exposer, toute une société.



Tags : Défense

Nouveau commentaire :

ENDERI promeut la liberté d'expression, dans le respect des personnes et des opinions. La rédaction d'ENDERI se réserve le droit de supprimer, sans préavis, tout commentaire à caractère insultant, diffamatoire, péremptoire, ou commercial.