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L’Union européenne veut financer la défense avec les reliquats du fonds Covid




Publié par François Lapierre le 10 Juin 2025

L’Union européenne envisage d’utiliser les marges budgétaires restantes de son plan de relance post-Covid pour accompagner la montée en puissance de son industrie de défense. Cette réorientation, fondée sur une logique de volontariat national, s’inscrit dans le cadre du futur programme EDIP.



Le cadre budgétaire : un potentiel inexploité au sein du RRF

Dans une communication officielle publiée le 4 juin 2025, la Commission européenne a proposé d’ouvrir aux États membres la possibilité de réaffecter une partie des fonds non utilisés du RRF – la Facilité pour la reprise et la résilience – afin de financer des contributions au futur Programme européen pour l’industrie de la défense (EDIP). Cette proposition vise à optimiser les ressources disponibles à l’approche de la clôture du dispositif de relance, prévue pour fin 2026, tout en répondant à l’impératif de renforcement de la base industrielle de défense européenne.

Mis en place en 2021 dans le cadre du plan NextGenerationEU, le RRF (Recovery and Resilience Facility) a mobilisé 723,8 milliards d’euros, répartis entre subventions et prêts pour accompagner les États membres après la crise sanitaire. Si la majorité des fonds ont été engagés dans des plans nationaux de relance, plusieurs dizaines de milliards d’euros demeurent encore disponibles ou faiblement consommés, en raison de retards d’exécution ou de priorités révisées.

Dans ce contexte, la Commission suggère de permettre aux États qui le souhaitent de redéployer les enveloppes inutilisées pour contribuer financièrement au programme EDIP, qui constitue l’un des volets principaux de la stratégie européenne de défense.
Selon le texte COM(2025) 310 final : « La FRR pourrait soutenir des contributions nationales volontaires au futur Programme européen pour l’industrie de la défense (EDIP). » Et de préciser : « La contribution à l’EDIP, dans un tel cas, serait considérée comme un investissement au titre de la FRR. » Ce dispositif reposerait sur une logique de contributions volontaires, dans le respect du cadre d’origine du RRF, qui impose des critères d’éligibilité liés à la résilience, à la modernisation des capacités industrielles ou à la souveraineté stratégique.

EDIP : un instrument structurant pour la base industrielle de défense

Le Programme européen pour l’industrie de la défense (EDIP) a été proposé par la Commission le 5 mars 2024, dans la continuité des initiatives EDIRPA et ASAP, déployées dans l’urgence du conflit russo-ukrainien. Doté d’un budget initial de 1,5 milliard d’euros sur trois ans, il vise à :
    • renforcer la capacité de production industrielle dans le domaine de la défense ;
    • favoriser les achats conjoints entre États membres ;
    • stimuler l’innovation dans les technologies stratégiques ;
    • soutenir la coopération avec l’Ukraine, notamment dans la reconstruction de son secteur de défense.

L’EDIP est conçu comme une réponse pérenne aux besoins capacitaires croissants identifiés dans le contexte d’une menace militaire persistante aux frontières de l’Union, et dans un souci d’autonomie stratégique vis-à-vis des partenaires extérieurs. Le recours aux fonds RRF permettrait d’accroître substantiellement les capacités financières de l’EDIP, sans solliciter de ressources nouvelles dans le budget de l’Union. Cette articulation budgétaire serait cependant encadrée par une clause spécifique, en cours de négociation, au sein du règlement EDIP. Comme l’indique la Commission dans son document : « Une disposition dans le règlement EDIP devra garantir que les contributions volontaires soutenues par la FRR soient utilisées au bénéfice de l’État membre concerné. »

Autrement dit, comme le souligne Euractiv, chaque État conserverait une maîtrise complète de l’utilisation de ses fonds transférés à l’EDIP, et les projets financés devraient lui bénéficier directement, à travers des contrats industriels ou des livraisons nationales.

Un mécanisme juridiquement possible, budgétairement incitatif

L’opération envisagée par la Commission respecte la logique du RRF, qui vise à soutenir la résilience économique et industrielle des États membres. Dès lors que les dépenses engagées à travers l’EDIP répondent à ces critères – amélioration des chaînes d’approvisionnement, hausse des capacités de production, modernisation technologique – elles peuvent être comptabilisées comme investissements éligibles dans les plans nationaux.

Le dispositif présente un avantage administratif significatif : il permettrait aux États membres d’atteindre leurs objectifs de décaissement du RRF sans engager de nouvelles dépenses budgétaires, en réorientant simplement des crédits déjà alloués mais non utilisés.

 



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