Un hommage spectaculaire orchestré à Pyongyang
Le 21 août 2025, Kim Jong-un a présidé une cérémonie exceptionnelle à Pyongyang en l’honneur des soldats nord-coréens revenus du front russe. Sous les drapeaux du Parti du travail de Corée, l’événement a été rythmé par des hommages militaires, un concert patriotique et une minute de silence en mémoire des morts. Selon El País, « Kim Jong-un a décerné le titre de “Héros de la République populaire démocratique de Corée” aux militaires revenus du front ».
La Corée du Nord, qui a toujours nié tout engagement direct en Ukraine, ne cache désormais plus son implication. L’attribution de décorations officielles, couplée à des gestes symboliques comme des accolades aux orphelins de guerre, marque un tournant. Reuters (21 août 2025) rapporte que Kim Jong-un a salué les combattants en ces termes : « Les activités de combat des forces opérationnelles à l’étranger… ont démontré sans réserve la puissance de l’armée héroïque [nord-coréenne]. ».
Corée du Nord : nouveau pilier de l’axe Moscou-Pyongyang
Depuis la signature, le 18 juin 2024, d’un accord de défense mutuelle entre Vladimir Poutine et Kim Jong-un, la coopération militaire entre la Corée du Nord et la Russie s’est renforcée de manière spectaculaire. Selon Arms Control Today (juillet 2024), cet accord prévoit une assistance réciproque en cas d’attaque, mais aussi un partage d’équipements, de savoir-faire balistique et d’effectifs.
Dans ce contexte, la présence de soldats nord-coréens en Ukraine ne relève plus du secret. Selon Euronews (22 août 2025), entre 10 000 et 15 000 soldats nord-coréens ont été déployés en soutien aux forces russes, principalement dans la région de Koursk. L’objectif : contenir les contre-offensives ukrainiennes et renforcer les lignes russes dans une zone stratégique.
Ce soutien militaire s’inscrit dans une dynamique de convergence politique entre Moscou et Pyongyang. En retour, la Russie aurait fourni à la Corée du Nord des ressources énergétiques, des céréales et une assistance technologique. La guerre en Ukraine agit ainsi comme un levier diplomatique pour Kim Jong-un, soucieux d’asseoir sa légitimité sur la scène internationale.
Des pertes lourdes assumées devant la nation
La cérémonie du 21 août a également été marquée par un hommage appuyé aux morts nord-coréens tombés en Ukraine. D’après The Guardian (22 août 2025), 101 portraits de soldats tués ont été exposés, et leurs familles conviées au banquet présidentiel. L’évocation des pertes s’est accompagnée d’un discours de Kim Jong-un mettant en valeur leur « esprit combatif », selon Reuters.
Côté chiffres, la Corée du Sud estime à environ 600 le nombre de morts nord-coréens recensés sur le front ukrainien, selon AP News (30 avril 2025). À ces pertes s’ajouteraient plusieurs milliers de blessés. Malgré ce bilan humain, Pyongyang présente l’opération comme un succès. El País précise que le colonel général Kim Yong Bok, de retour du front, a été salué comme stratège et meneur d’hommes.
L’objectif affiché est clair : inscrire ces engagements dans une mythologie nationale, en faire un socle de fierté patriotique, et renforcer la cohésion intérieure. Dans une économie fragilisée par les sanctions, ces démonstrations de force servent également à galvaniser une population de plus en plus sollicitée pour l’effort de guerre.
L’internationalisation du conflit : un signal d’alerte pour Kiev
Pour Kiev, l’implication croissante de la Corée du Nord représente un défi majeur. Alors que les autorités ukrainiennes tentent de maintenir leurs positions dans l’est du pays, le soutien direct d’un État tiers à l’armée russe complique la donne. Sur le plan militaire, l’arrivée de contingents étrangers, mieux équipés et motivés, pourrait modifier l’équilibre des forces.
Mais c’est surtout sur le plan politique que cette alliance inquiète. Elle préfigure une polarisation du conflit en blocs géopolitiques rivaux, dans une logique proche de la guerre froide. En s’affichant au côté de la Russie, Kim Jong-un défie les sanctions internationales, et se présente comme un leader prêt à assumer ses choix stratégiques. El País insiste sur la portée symbolique de cet engagement : « Kim Jong-un a transformé un acte de guerre en outil de diplomatie offensive ».
La Corée du Nord, souvent perçue comme un État isolé, entend désormais peser dans les équilibres globaux. Son engagement dans la guerre en Ukraine confirme une ambition plus vaste : celle de devenir un partenaire incontournable dans les conflits périphériques où les grandes puissances s’affrontent.