Sainte-Soline : "les gendarmes n'ont pas failli, ils ont rempli leur mission avec professionnalisme"



le 6 Novembre 2025



Photo Pixabay

Par un ancien officier de la Gendarmerie Mobile

Je suis en colère parce qu'on inverse les choses. Suite aux polémiques déclenchées par Libération et Mediapart, on reproche à des gendarmes d'avoir tenu des propos déplacés et d'avoir effectué des tirs tendus de grenades lacrymogènes. Il faut remettre les faits dans le bon ordre : la violence, la vraie, était du côté des Black Blocs, venus non pas pour manifester, mais pour casser du gendarme. Ces individus ont attaqué avec une brutalité inouïe, utilisant des cocktails Molotov, des bouteilles d'acide, des barres de fer et incendiant des véhicules des armes capables de tuer. Face à eux, les gendarmes sont restés statiques, encadrés, cherchant simplement à maintenir à distance ces barbares qui voulaient venir au contact. Alors oui, il y a peut-être eu des mots de trop, mais c'est dérisoire au regard de la violence déployée contre eux. Ce ne sont pas les forces de l'ordre qu'il faut accuser, mais ceux qui les agressent.
 

La Gendarmerie mobile est d'abord une force démocratique. Elle a été créée pour encadrer la contestation et permettre aux citoyens de manifester dans le calme, pas pour faire un usage excessif de la violence. Son rôle premier n'est pas de « rétablir l'ordre », mais de le maintenir, d'éviter que la manifestation ne dégénère. Le rétablissement de l'ordre n'intervient que lorsque tout le reste a échoué, et c'est toujours un échec collectif : celui de la société à dialoguer, et celui des autorités à prévenir.
 

À Sainte-Soline, les gendarmes n'ont pas échoué. Ils ont rempli leur mission face à une violence d'une intensité exceptionnelle. Ceux qui n'ont jamais commandé des forces de maintien de l'ordre sur le terrain ne peuvent pas imaginer ce que c'est que d'être une vingtaine de gendarmes face à deux cents individus casqués, masqués, déterminés, armés de barres de fer, de bouteilles d'acide, de mortiers artisanaux et de cocktails Molotov. Ces engins incendiaires peuvent tuer. Et pourtant, dans le débat public, certains les évoquent comme s'il s'agissait d'un simple « répertoire d'action » militant. C'est profondément anormal. A sainte Soline des gendarmes ont été brulés. Ils auraient pu mourir brulé vif. Dans n'importe quel autre pays, lancer un cocktail Molotov sur un agent de l'État serait considéré comme une tentative d'homicide et les forces de l'ordre pourraient tirer à balles réelles.


Face à cela, les gendarmes disposent de moyens non létaux : gaz lacrymogène, grenades de désencerclement, grenades assourdissantes. Les grenades offensives, qui permettaient autrefois de maintenir à distance les assaillants, ont été retirées du service après l'affaire Remi Fraisse. Mais à force de désarmer nos forces de l'ordre, on prend le risque de les laisser approcher. Que faire face à des casseurs déchainés ? Les laisser approcher et lyncher les gendarmes avec le risque que l'un d'eux prennent son arme de service pour se défendre ? La seule solution est le tir tendu. C'est interdit en principe mais c'est nécessaire. Il faut savoir que certains gendarmes ont vu leur mort arriver et d'après ce que je sais certains sont en stress post traumatique.
 

On ne peut pas reprocher à ces hommes d'avoir tenu, d'avoir fait leur devoir avec les moyens qu'on leur donne. Ils ont maintenu l'ordre malgré des assaillants d'une extrême violence, malgré la peur, malgré la fatigue. Dans ces moments-là, l'être humain reste un être humain. Oui, il peut y avoir des propos tenus dans la tension de l'action, qui, sortis de leur contexte, paraissent déplacés. Mais mettez-vous à leur place : au milieu des explosions, des flammes, des camarades blessés, ces paroles ne traduisent pas la haine, mais la peur, l'adrénaline, le stress. On ne peut pas réduire leurs actions parfaitement maîtrisées à quelques mots prononcés sous le choc.


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La Gendarmerie mobile est une force militaire disciplinée, parfaitement encadrée, formée pour contenir la violence sans jamais la déchaîner. On nous enseignait à l'EOGN qu'un manifestant violent restait avant tout un citoyen momentanément égaré. Cela veut dire que même dans la fureur de l'affrontement, le respect de l'autre doit demeurer. C'est cette philosophie qui fonde la noblesse du maintien de l'ordre à la française : une violence contenue, légitime, encadrée, au service de la République.

À Sainte-Soline, les gendarmes ont agi dans ce cadre. Il n'y a pas eu de morts, et compte tenu de la violence déchaînée contre eux, c'est un signe de maîtrise et de professionnalisme. Ils ont fait leur devoir, rien de plus, rien de moins. Sans eux, cette journée aurait pu se terminer dans le sang. Dans de nombreux pays, y compris démocratiques, l'usage des armes aurait été considéré comme normal dans une telle situation. Oui l'usage du tir tendu était nécessaire car c'était un moindre mal face à des hordes de barbares pour les tenir à distance. Les laisser approcher aurait probablement eu des conséquences très graves des deux cotés.

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