Diesel, la fin pour bientôt ?



Publié par Solaine Legault le 22 Février 2015

Depuis la parution d'un rapport de l'OMS en juin 2012, faisant état d'une forte nocivité des particules émise par les moteurs diesel, le gouvernement français ne sait plus où donner de la tête entre les écologistes qui alimentent la polémique sur les risques sanitaires, et les industriels qui défendent le diesel en rappelant que des milliers d'emplois dépendent de la fabrication de ce type de moteur. Les premiers sont aujourd’hui nettement en train de remporter le point.



(Sous licence Creative Commons)
L'OMS classe les gaz d'échappement diesel, comme cancérogènes certains

En juin 2012, l'OMS publiait un rapport selon lequel les gaz d'échappement des véhicules diesel seraient cancérogènes, et depuis, la polémique n’a cessé d’enfler. Les gouvernements successifs se sont depuis longtemps emparés du dossier en expliquant que les questions gravitant autour de la dangerosité des particules fines, émises par les véhicules diesel, seront traitées rapidement, afin de prendre des mesures appropriées. Le gouvernement sait combien ce dossier est délicat, car il est aujourd’hui, pris entre le feu des écologistes et celui des industriels de l’automobile. Or, dans le contexte de crise économique et de crise écologique, difficile de trouver un juste milieu. En effet, difficile de donner tort aux écologistes qui brandissent le rapport de l’OMS en prônant l’interdiction pure et simple des moteurs diesel en centre-ville. Ce rapport témoigne d’une réelle nocivité des particules fines du diesel, avec des risques bien réels de cancer du poumon, mais aussi de la vessie. Cependant, interdire les moteurs diesel, reviendrait à supprimer des milliers d’emplois, et à mettre en péril l’industrie automobile française, pourtant indispensable à l’économie du pays. D’autant plus importante que la crise pèse déjà sur les finances de l’état, que ce dernier croule sous la dette souveraine, et que le déficit commercial du pays bat des records depuis plusieurs années déjà. De ce point de vue, l’interdiction du diesel est tout à fait inenvisageable.

La France, accro au diesel

Rappelons que la France est un cas particulier, car la majorité de son parc automobile roulant est composé de véhicules diesel (62 % tous véhicules confondus en 2013, en augmentation). Une part considérable si on l’a compare aux autres pays de l'Union européenne, mais aussi comparée à tous les autres pays. Et pour cause, le diesel était à l'origine, exclusivement utilisé pour motoriser les tracteurs et les camions. Aussi, pour soutenir les artisans, agriculteurs et transporteurs routiers dans les années 50, l'état français décide que ce carburant bénéficierait d'allègements de taxes. Mais au moment du second choc pétrolier, les constructeurs automobiles se sont lancés dans la production de voitures diesel, pour alléger le cout d'utilisation des petits véhicules. Une aubaine pour les automobilistes qui se sont ruées sur les citadines diesel. Le constructeur PSA Peugeot Citroën était alors un pionnier en matière de motorisation diesel, et a revu son modèle de développement en se basant essentiellement sur ce type de motorisation. Renault s’est également engouffré dans la brèche, et aujourd’hui, les deux constructeurs sont entièrement dépendants du diesel. L’interdiction de ce type de motorisation, même ciblé simplement dans les centres-villes serait catastrophique pour l’industrie automobile, mais aussi pour l’état dont les recettes s’effondreraient. Mais sachant que les particules fines sont à l’origine de plus de 40.000 décès par an en France, des mesures radicales s’imposent malgré tout.

Dilemme entre risques, sanitaire, écologique et économique

Du côté des écologistes, l'interdiction des véhicules diesel en centre-ville au plus tôt, est un impératif non discutable, car en résumé, le diesel tue. Naturellement, dans l'arène politique, les verts prônent cette interdiction de longue date, mais l’idée commence à faire son chemin au sein des grands partis, à commencer par le PS et ses représentations locales : la Mairie de Paris vient ainsi de lancer une des politiques les plus contraignantes contre la pollution automobile, même si elle ne vise pas exclusivement le diesel.

Mais du côté des industriels de l'automobile, à commencer par PSA, la référence des constructeurs diesel en France, les risques ne sont pas aussi importants que le prétend le rapport de l’OMS. Aussi, face à la polémique grandissante, le constructeur a ainsi d'organisé une visite dans un centre technique de la région parisienne, pour remettre les points sur les i. Durant cette visite, PSA n'a pas manqué de rappeler que l'interdiction du diesel ne pèserait pas uniquement sur les constructeurs, mais aussi sur des milliers de ménages, car la totalité des moteurs diesel est fabriquée en France. Chez Renault, les usines françaises dédiées aux véhicules diesel ne sont pas moins nombreuses. Ainsi, ce sont près de 10.000 emplois au total qui risqueraient de disparaitre. Les propriétaires de véhicules diesel seraient également touchés par l'interdiction que prônent les verts, car le prix des véhicules à la revente sur le marché de l'occasion serait impacté. Enfin, PSA soutient qu’une interdiction du diesel annulerait tous les efforts fournis en R&D pour produire des moteurs plus propres, l’essentiel de la pollution aux particules fines étant dues aux diesels anciens, non catalysés et non filtrés. Bien que nettement moins polluants, les nouveaux émettent, eux, encore des particules ultrafines, dont l’impact n’est pas encore connu, mais il ne sera certainement pas bénin.

Remise en cause du protocole d’étude de l’OMS

Mis à part les aspects sociaux économiques, sur lesquels les conséquences d’une interdiction du diesel seraient désastreuses, PSA n’a pas manqué de rappeler les efforts fournis par les constructeurs, pour se conformer aux exigences environnementales. Fabriquant les moteurs diesel les moins polluants au monde, PSA n’a pas hésité à remettre en cause la validité du protocole d’étude de l’OMS. En effet, il s’avère que l’OMS s’est concentrée sur les moteurs fabriqués avant l’introduction d’exigences environnementales comme la norme euro 5, qui impose aux constructeurs de mettre des filtres à particules au niveau de l’échappement des véhicules diesel. Cette norme est en vigueur depuis début 2011, et des millions de véhicules sont déjà équipés de filtre à particules. L’émission de ces particules est ainsi passée officiellement de plus de 3 millions à 3500 seulement, à savoir à peine le double de la concentration de particule de l’air pur de montagne, selon les données constructeurs. Mais il s’agit de données valables pour des véhicules neufs : quelles émissions après trois ou quatre années d’usages dans les embouteillages ?

D’autre part, les constructeurs font valoir des innovations comme les moteurs hybrides qui permettent de réduire les émissions de CO₂. Sur cette question spécifique, l’impact global des nouveaux moteurs diesel est aujourd’hui inférieur à celui des moteurs à essence. Le vrai problème vient donc des véhicules diesel de plus de 15 ans, et sur ce point, les constructeurs sont toujours bien disposés à recevoir des aides du gouvernement pour aider au renouvellement du parc.

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