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La politique d'acquisition de Safran est-elle réellement un "échec" ?




Publié par La Rédaction le 30 Avril 2013

Le fonds britannique TCI (The Children's Investment Fund) est actionnaire du groupe Safran à hauteur d'environ 3 %, et a récemment lancé une offensive contre la politique du groupe. TCI reproche à Safran, de consacrer une part trop importante de son capital aux acquisitions hors aérospatial, et de détruire ainsi la valeur du titre Safran. Cependant, les dirigeants du groupe ne semblent pas voir les choses de la même manière, et ont annoncé de nouvelles acquisitions.



La politique d'acquisition de Safran est-elle réellement un "échec" ?
Le point de vue de TCI

Le fonds TCI, un fonds britannique très actif dans les sociétés dont il détient des parts de capital, a récemment exprimé son désaccord sur la politique d'acquisition de Safran. De quoi susciter des interrogations chez les observateurs surtout que Safran n'a fait aucun commentaire au sujet de l'offensive de TCI. Le groupe envisage d’ailleurs de poursuivre sa politique d'acquisition, car il la juge profitable sur le long terme. Pourtant, TCI affirme que la politique du groupe français l'a conduit à une baisse de performance sur ses cœurs de métier que sont la propulsion aérospatiale et l'équipement aéronautique. Ces deux divisions offrent des perspectives de croissance exceptionnelles avec un fort potentiel à générer davantage de free cash flows, ce qui devrait admettre un indice boursier plus élevé, si Safran ne cherchait pas à se diversifier autant, et à faire de nouvelles acquisitions pour ses divisions : défense et sécurité. TCI s'oppose ainsi farouchement à l'acquisition du groupe Zodiac, qui a déjà reçu une offre de la part de Safran, car TCI juge que le secteur d'activité de cette société est de moindre valeur comparé à ceux de Safran. De plus, TCI rejette l'hypothèse d'une fusion avec EADS, car le groupe deviendrait trop "politique". En effet, les deux groupes ont un actionnariat majoritairement détenu par l'état, ce qui pourrait conduire à des discordes au niveau de la gouvernance et des orientations stratégiques. D’autre part, l’épisode Sagem témoigne du mauvais jugement des dirigeants de Safran, ce qui pourrait donner raison à TCI.

Quand Safran cède Sagem Mobiles

Sagem Mobiles était à ses débuts, le numéro 1 des fabricants de téléphones portables sur le marché français. Mais depuis plusieurs années le fabricant était en perte, et Safran, alors actionnaire majoritaire, a attendu 2008 avant de s'en séparer. Sagem Mobiles accusait alors plus de 45 millions d'euros de déficit. Outre ces pertes colossales qui pesaient sur les comptes de Safran, le groupe français a dû débourser 220 millions d'euros supplémentaires pour replacer les milliers d'employés licenciés lorsque Sofinnova, un fonds français de capital-risque, a repris Sagem Mobiles. Une mauvaise opération qui confirme le point de vu de TCI, sur la mauvaise politique d'acquisition de Safran. La fabrication de téléphone portable ne faisait pas partie de ses cœurs de métiers, et au final, Safran a perdu de la valeur. Pourtant, le groupe n’a pas renoncé pour autant à Sagem Mobiles, qui est devenu Sagem Wireless. En effet, Safran détient 10% du capital de Sagem Wireless, et le président du directoire de Safran, Jean-Paul Herteman, est persuadé que cette participation en capital sera profitable, notamment grâce à la nouvelle orientation stratégique de Sagem, qui se focalisera désormais sur une activité de constructeur designer. Le président-directeur général de Sagem quant à lui, se veut rassurant et explique que les marchés visés sont ceux du sport, de la mode, et du luxe, et que Sagem créera des designs, essentiellement pour de grandes marques, alors que la production sera entièrement sous-traitée. Ce qui admettra une réduction de coût importante et une réduction des risques, mais cela ne suffit pas à juger si la politique d’acquisition de Safran est un échec ou non.

L’avis des analystes sur le secteur de la valeur

Les bureaux d'études et les analystes expriment des avis plutôt positifs sur la politique d'acquisition de Safran. Il s'avère que le groupe jouit d'une situation financière stable, et qu'il génère des cash flows élevés, et récurrents. Sachant cela, le groupe français est tout à fait en mesure d'investir, et de poursuivre sa politique d'acquisition. De plus, le projet de moteur TM800 qui devra équiper le nouvel appareil d'Eurocopter sera un formidable tremplin pour Turbomeca, la filiale de Safran qui développe le TM800. Ce nouvel hélicoptère, le X4, est attendu comme un appareil innovant, porteur de rupture technologique, et le moteur TM800 de Turbomeca participera à cette rupture, avec des performances et des coûts d'opération optimisés. Les perspectives de croissance de Turbomeca sont donc prometteuses, et Safran peut compter sur sa filiale pour ne pas remettre en question sa politique. Cependant, Safran n'est pas un leader dans ses cœurs de métiers, et l'on peut comprendre les inquiétudes du fond TCI, car les équipementiers aéronautiques et autres spécialistes américains de la motorisation aérospatiale pourraient distancer le groupe. Mais c'est aussi pour la même raison que Safran cherche à se diversifier. De plus, les plans d'austérité appliqués par les états européens vont se traduire par une réduction de leurs dépenses militaires, avec par conséquent un impact négatif sur la division défense de Safran. Sachant cela, la politique d'acquisition du groupe est une nécessité pour entretenir sa valeur.

La valeur du groupe Safran

Le groupe Safran est dans une situation financière confortable et stable, qui rassure les investisseurs sur les marchés financiers. Pourtant, la valeur de l'action du groupe est dépendante de plusieurs facteurs qui présentent des risques. Tout d’abord, Safran est membre d'un consortium formé pour le développement du moteur de l'A400M, l'avion militaire d'Airbus. Or, le projet A400M a pris un retard considérable et bloque des capitaux tout en contribuant à la dévaluation de Safran. De plus, le groupe est également dans l'attente de la suite du programme B787 de Boeing. Ainsi, Safran est entièrement dépendant de deux grands programmes qui pèsent sur sa principale branche d'activité qu'est la motorisation aérospatiale. Ensuite, la hausse constante du coût des matières premières menace la rentabilité des produits Safran. Enfin, avec plus de 30 % de part de capital détenus par l'état, Safran est sensible au changement de situation politique. Autant de facteurs qui influent sur la valeur du groupe, et qui pèsent sur sa pérennité. Certains analystes pensent que la valeur du groupe se stabilisera grâce à une acquisition structurante, dans les branches de prédilection du groupe, à savoir la propulsion aéronautique et l’équipement. Ainsi, même si certaines acquisitions passées peuvent être remises en question, on ne peut pas dire que la politique d’acquisition de Safran soit un échec.



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