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Quel avenir pour l’EPR ?




Publié par Camille Blanc le 8 Octobre 2018

Mauvaise nouvelle pour la filière nucléaire française, l’EPR dont EDF et Areva attendaient tant, connaît des difficultés. Même, l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) s’en inquiète.



Nicolas Hulot, l’ex-ministre de la Transition écologique avait lancé avec Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, une mission sur le maintien des compétences dans le nucléaire. Le rapport, rendu juste avant le départ de Nicolas Hulot, préconise de construire six EPR à partir de 2025 (1). Est-ce le signe d’une poursuite de la « folie inutile » du nucléaire, dénoncée par l’ancien ministre ? 

Rêve d’ingénieur

Au départ, l’EPR est un conte de fées pour la crème des ingénieurs français. Le réacteur EPR (European Pressurised Reactor), réacteur de nouvelle génération à eau sous pression (REP) construit par Areva — devenu Orano en janvier dernier — devait rapidement prendre la relève des centrales en exploitation.
Sur le papier, l’EPR devait permettre de produire une énergie 10 % moins chère au kwh que le nucléaire actuel, et 20 % moins chère que le gaz. Un gain obtenu par conjonction de plusieurs facteurs : une puissance accrue du réacteur (1.600 Mwe contre 1450 Mwe aujourd’hui), une diminution de 15 % de l’uranium nécessaire pour produire l’électricité, une durée de vie de 60 ans au lieu de 40, et un délai de construction ramené à moins de cinq ans. Le premier EPR français devait être implanté en 2012 à Flamanville, dans le Cotentin.

Sept ans de retard et un coût multiplié par trois (pour l’instant)

Mais, patatras, le projet n’a cessé d’accumuler difficultés et retards.
En juillet 2018, EDF confirme encore un retard supplémentaire, sans précision sur le délai, conséquence de problèmes de soudure sur le circuit secondaire principal, annoncés dès le mois d’avril. « Les échanges avec l’Autorité de sûreté nucléaire relatifs aux écarts de qualité sur certaines soudures du circuit secondaire se poursuivent », a simplement déclaré une porte-parole de l’électricien français (2).
Une fois n’est pas coutume, l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN), le gendarme du nucléaire, a en effet tiré le signal d’alarme (3). Rappelons qu’en interne, les premiers problèmes de soudures ont été détectés dès juillet 2015, mais ont été officiellement dévoilés en mars 2018. Un retard inexcusable pour l’ASN, qui demande « une analyse approfondie des dysfonctionnements ». Quant à la réparation des soudures, « un travail important reste à faire », estime l’ASN.

Embarras, attentisme et "éléments de langage"

Peu après tombe le rapport remis par un ancien administrateur général du Commissariat à l’énergie atomique (CEA), Yannick d’Escatha, et à un ex-délégué général à l’armement, Laurent Collet-Billo, qui plaide pour la construction d’un premier lot de six nouveaux EPR à compter de 2025.
« Est-ce qu’il faut construire de nouveaux EPR ? Ce sera au président de la République et au Premier ministre de décider. Je rappelle qu’il y en a un qui est en construction. La sagesse recommande déjà d’attendre que l’EPR de Flamanville soit achevé avant de prendre des décisions », a déclaré Bruno Le Maire (4). « Ce n’est pas un rapport qui décide de la politique du gouvernement. Ce rapport apporte des éléments d’information sur des choix qui seront faits d’ici la fin de l’année », a insisté le ministre.

Conséquence directe, ce nouveau retard repousse la fermeture de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin). « La fermeture de Fessenheim est irréversible et le processus d’accompagnement des personnes et du territoire a commencé. La date de fermeture effective, quant à elle, est liée au démarrage de l’EPR de Flamanville », Sébastien Lecornu, secrétaire d’Etat. Une lecture de la situation que ne partagent pas les écologistes, qui accusent le gouvernement de faire le jeu d’EDF. « A ce train-là, Fessenheim ne fermera pas dans le quinquennat de Macron ! », a réagi le Réseau Sortir du nucléaire (5).
Officiellement, la diversification du mix énergétique reste néanmoins à l’ordre du jour.

 

(1) https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/0302174553753-nucleaire-le-rapport-qui-genait-nicolas-hulot-2201014.php
(2) https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/07/04/nouveau-retard-pour-le-reacteur-epr-de-flamanville_5325860_3234.html
(3) https://www.lamanchelibre.fr/actualite-594795-epr-de-flamanville-l-autorite-de-surete-nucleaire-evoque-une-defaillance
(4) https://actu.orange.fr/france/nucleaire-un-rapport-commande-par-bercy-et-hulot-prone-la-construction-de-six-epr-selon-les-echos-CNT00000164AZH.html
(5) https://www.lemonde.fr/energies/article/2018/07/25/l-epr-de-flamanville-retarde-d-un-an-le-cout-augmente-de-400-millions-d-euros_5335611_1653054.html

 



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