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Armées françaises : la nouvelle doctrine d’emploi des armes informatiques




Publié par Michel Roy le 21 Janvier 2019

Pour faire face aux cyberattaques, la France se dote d’une doctrine de lutte informatique à la fois offensive et décomplexée. 1 000 cybercombattants supplémentaires vont être recrutés d’ici 2025 pour un effectif total de 4 000 personnes réparties entre le commandement de la cyberdéfense (Comcyber), de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et de la Direction générale de l’armement (DGA).



« La guerre cyber a commencé et la France doit être prête à y combattre », a déclaré Florence Parly le 18 janvier lors d’une conférence annonçant une "doctrine militaire de lutte informatique". Voulant prouver la gravité de la situation, la ministre des Armées a révélé qu’en 2017, une cyberattaque a visé son ministère. « Nous renforçons nos effectifs et d’ici 2025, nous compterons 1 000 cybercombattants supplémentaires », a-t-elle assuré. L’effectif atteindra au total 4000 personnes d’ici sept ans, répartis au sein du commandement de la cyberdéfense (Comcyber), de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et de la Direction générale de l’armement (DGA). « Nous renforçons les moyens avec 1,6 milliard d’euros investis pour la lutte dans le cyberespace », a-t-elle ajouté.

Le chef d’état-major des armées, le général François Lecointre, a précisé que les cyberattaques proviennent non seulement d’états, mais aussi venant de hackers, groupes terroristes ou de criminels. « Les armes cyber apparaissent désormais comme des éléments incontournables de l’action militaire », annonce le général Lecointre.

Une nouvelle doctrine

« Nous avons décidé d’organiser une chaîne cyberdéfensive de bout en bout, qui protège autant nos forces que notre maintenance et notre industrie », a poursuivi la ministre. Un partenariat entre le ministère et les industriels doit être annoncé lors de forum international de la cybersécurité (FIC), qui se tiendra à Lille  les 22 et 23 janvier.
Florence Parly, a assuré qu’il fallait également « préparer nos armées à cette nouvelle guerre, en nous assurant qu’elles disposent d’une doctrine et de capacités de lutte informatique offensive ». En cas d’attaque cyber contre les forces, la position est claire : « Nous nous réservons le droit de riposter, dans le respect du droit, par les moyens et au moment de notre choix », a expliqué la ministre. « Nous nous réservons aussi, quel que soit l’assaillant, le droit de neutraliser les effets et les moyens numériques employés », a-t-elle poursuivi. « Mais nous serons aussi prêts à employer en opérations extérieures l’arme cyber à des fins offensives, isolément ou en appui de nos moyens conventionnels, pour en démultiplier les effets », a-t-elle conclu.

Lutte informatique offensive (LIO)

Le général Lecointre, chef d’état-major des armées a précisé cette doctrine. Le cyber est envisagé aujourd’hui comme « arme d’emploi, arme du champ de bataille dans nos opérations », a-t-il expliqué. Les armes cyber sont pour lui des « instruments incontournables de l’action militaire », face à « des potentialités de désorganisation massive qui ne doivent pas être ignorées, mais intégrées dans une pensée stratégique renouvelée ». 

La doctrine de lutte informatique offensive (LIO) — qui a été rédigée par le général Bonnet de Paillerets, commandant de la cyberdéfense — a pour objectif « d’intégrer cette nouvelle capacité à la manœuvre d’ensemble des armées », a assuré le général Lecointre.

Arme de riposte

« La lutte informatique défensive est essentielle à la protection de nos moyens dans la conduite des opérations, mais il est possible d’aller au-delà : la lutte informatique offensive peut être un formidable démultiplicateur d’effets », a-t-il ajouté, espérant « tirer parti des vulnérabilités des systèmes numériques adverses ». Cela « élargit considérablement le champ des possibilités et la palette des options modulables que je suis susceptible de proposer au président de la République », s’est-il félicité.

Selon lui, trois grands effets peuvent être obtenus sur le plan opérationnel : « le renseignement, par l’extraction et le recueil d’informations, la déception (tromper l’adversaire), en permettant la modification des capacités d’analyse de l’ennemi, et la neutralisation, en permettant la réduction, voire la destruction des capacités cyber et militaires adverses ». Pour résumer sa pensée, il a cité le stratège britannique John Fuller : « l’arme maîtresse n’est pas obligatoirement la plus puissante ou celle qui assène le plus de coups ; c’est l’arme qui, ayant la plus longue portée, peut entrer la première en action et servir de couverture aux autres armes »....

L’Armée française devra aussi tenir compte de nouveaux risques. Les objets numériques du quotidien, chez les civils aussi bien que chez les militaires, étant devenus potentiellement piratables (smartphones, applis, objets connectés), les militaires sont conscients des failles qui peuvent s’ouvrir. En 2018, en utilisant une appli de fitness, des militaires américains avaient, par exemple, dévoilé sans le vouloir l’emplacement de bases secrètes, notamment en Syrie.

Nos soldats seront-ils équipés d’appareils sécurisés ? Florence Parly ne l’a pas précisé. La ministre affirme en revanche qu’en cas d’attaque, la France utilisera l’arme cyber. « Que ceux qui sont tentés de s’attaquer à nos forces armées le sachent : nous n’aurons pas peur de l’utiliser », prévient la ministre en précisant que la riposte se fera « dans le respect du droit international ».



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