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L'innovation de procédé : un instrument de la stratégie ?




Publié par La Rédaction le 30 Avril 2013

Des chaînes de production aux bureaux d’études, l’industrie demeure un espace privilégié de l'innovation. Grand théoricien du sujet, Joseph Schumpeter en voyait deux formes : l’innovation de produit et l’innovation de procédé. Cette dernière désigne le fait d’améliorer un processus de production ou de le remplacer par un autre plus performant, et constitue aujourd’hui un facteur déterminant de la réussite industrielle.



L'innovation de procédé : un instrument de la stratégie ?
En effet, certaines entreprises ont apprivoisé le concept, expérimentant sans relâche comme autant de laboratoires isolés. En dépit de la crise, ces entreprises industrielles font aujourd’hui preuve d’un grand dynamisme. Elles investissent, développent leur réseau à l’international, remplissent leur carnet de commandes et peuvent compter sur la confiance de leurs clients. Comment ont-elles intégré l’innovation de procédé à leur chaine de production ?
 
Une alternative au lean management ?

Indépendamment de toute conjecture, produire plus et/ou mieux avec le moins de ressources possible demeure l’un des objectifs clés de toute entreprise industrielle. Dans cette optique, parvenir à réaliser des économies de coût s’apparente à actionner un puissant levier de compétitivité.  Pour y parvenir, certaines entreprises privilégient le recours à l’innovation de procédé plutôt qu’au lean management, dont les limites ont d’ailleurs été pointées du doigt par certains experts. Privilégiant l’amélioration des outils et des méthodes au rationnement des ressources, Malteurop en est un exemple parlant.
 
Acteur intégrateur de la filière du malt, Malteurop organise l’approvisionnement en matières premières pour le compte de grands brasseurs industriels. Proposant un produit quasi-brut à des clients dont le besoin évolue peu, Malteurop ne peut compter que sur le perfectionnement de son mode de production pour améliorer la rentabilité de son activité. Cette recherche de profitabilité l’a conduit à poursuivre une politique d’amélioration continue de ses processus industriels. Malteurop s’est ainsi dotée d’une Direction Technique dont la mission est notamment d’optimiser les procédés de fabrication en vigueur dans ses malteries. Le rendement des matières premières ou encore la consommation d’énergie des usines sont passés au peigne fin par une équipe d’ingénieurs chargés d’élaborer des solutions de production efficaces. Ses chercheurs développent chaque année de nouvelles variétés d’orges et de malts plus faciles à cultiver et à transporter. À titre d'exemple, le procédé de germination des grains d’orge fait également l’objet d’une optimisation en temps et en ressource qui permet à Malteurop d’obtenir un produit de qualité constante tout en réalisant des économies. La mission de la Direction Technique dépasse donc la seule définition des grandes orientations technologiques : Malteurop présente volontiers le travail de cette unité comme une « clé dans la performance économique des malteries du groupe ».
 
Pour les entreprises comme Malteurop dont le marché évolue peu techniquement, l’innovation de procédé est donc l’une des seules pistes possibles d’amélioration de la rentabilité. Elle constitue à ce titre un véritable enjeu pour les entreprises industrielles, quelles qu'elles soient. C'est également vrai pour les sous-traitants de spécialité des entreprises industrielles, et ça l'est encore plus lorsqu'elles sont confrontées à un fort degré de technicité.
 
Des prestataires spécialisés 
 
Forsee Power Solutions est un assembleur-intégrateur de systèmes de batterie dont l'expertise s’adresse à des fabricants d'équipements portatifs aux besoins techniques très spécifiques. L'entreprise s'est distinguée en faisant l’innovation de procédé son coeur de métier, puisque chaque besoin spécifique d'intégration d'un système de batterie induit l'adoption une solution ad hoc, obligeant les ingénieurs à repenser leur façon d'intégrer un système complexe à un équipement lui-même complexe. En d'autres termes, ils intègrent des hautes technologies.. à d'autres hautes technologies. "Nous devons être capables de manier les accumulateurs de dernière génération pour en faire des systèmes de batterie complexes répondant aux normes les plus abouties, que ce soit sur le plan écologique, purement opérationnel, ou sur celui de la sécurité", explique Philippe Alleil, son directeur technique. René de Gaillande, son président, indique pour sa part que "les industriels, consommateurs d'énergie embarquée, ont parfois du mal à trouver un interlocuteur attentif et suffisamment compétent, capable d'implémenter une solution sur-mesure à leurs équipements et à des technologies parfois singulières. Ils nous exposent leurs contraintes, et nous nous efforçons de leur proposer un système complet, sécurisé et à un prix compatible avec celui de l'équipement concerné."
 
De la qualité du travail d’intégration du système de batterie dépendront en effet la durée de vie et l’ergonomie des équipements nomades. Dans le cadre de son activité, l’entreprise se repose extensivement sur sa structure légère et ses ingénieurs spécialisés dans l’électronique, l’électrochimie et la mécanique. À l’occasion d’une mission réalisée pour le fabricant de vélo électrique Easybike, les équipes de Forsee ont ainsi travaillé à la conception d’un système de batterie en partenariat étroit avec le fabricant. Cette relation est d'autant plus incontournable quand il s'agit d'équiper des équipements médicaux ou des terminaux de paiement au sujet desquels le mot "panne" est évidemment proscrit. Par conséquent, chez Forsee Power Solutions, chaque nouvelle demande occasionne la conception d’un nouveau processus de production.
 
Un outil de repositionnement concurrentiel ?

Si les enjeux de l’innovation de procédé semblent évidents au regard des exemples précédemment fournis, on ne peut saisir tout l'intérêt de ce concept qu’en observant son utilisation dans le cas qui suit. Technicolor SA l'a bien illustré dans les années 1990, alors qu'elle était connue sous le nom de Thomson Multimédia. Alors en proie aux plus grandes difficultés, Thomson était parvenue à survivre de justesse à la concurrence asiatique en changeant radicalement d’offre et de modèle de production. Comptant parmi les anciens leaders du marché des magnétoscopes et des téléviseurs, Thomson envisageait alors de trouver un second souffle en redéployant ses activités dans la conception de systèmes vidéo. L’entreprise souhaitait passer ainsi du statut de fabricant de produits de consommation de masse à celui de pourvoyeur de solutions techniques destinées aux professionnels.
 
Persévérant dans cette voie, l’entreprise remportait en 1995 un contrat d’une valeur de 5 milliards de francs (soit quelque 760 millions d’euros) pour réaliser le réseau de télévision numérique de trois entreprises du secteur des télécoms américains. Dix ans plus tard et forte de cette expérience fructueuse, Thomson avait réagencé en profondeur son outil productif.
 
L’entreprise avait ainsi cédé en 2005 ses chaînes de production de matériel électronique grand public à des groupes étrangers, dont le Chinois TCL et l’Indien Videocon. Thomson avait redéfini sa politique de R&D afin de l’intégrer dans un modèle de production évolutif et conçu pour s’adapter aux besoins spécifiques du marché. Elle avait réussi un pari novateur : celui d’abandonner la production en série au profit d’une conception sur mesure reposant sur l’exploitation optimale de l’expertise de ses ingénieurs. La survie de Thomson Multimédia tient ainsi pour une large partie de sa grande capacité d’innovation dans les procédés. C’est elle qui lui a conféré la capacité de produire un même produit sous d’infinies déclinaisons techniques afin de répondre à des demandes spécifiques et pointues. Cet exemple prend aujourd’hui une résonance toute particulière : en ces temps de crise, l’innovation de procédé apparaît comme un outil pertinent de réagencement productif et repositionnement concurrentiel.
 
La culture du learning by doing comme clé du succès 
 
Ces quelques exemples en témoignent : l’innovation de procédé est un véritable levier de performance pour les entreprises industrielles. Ce type d’innovation est en effet une source d’économies, mais aussi de différenciation par l’excellence. En outre, son potentiel est tel que de grandes entreprises comme Thomson lui doivent leur survie. Joseph Schumpeter faisait de l’innovation le moteur de la croissance et sa philosophie de l’entreprise. L’industrie semble confirmer à nouveau aujourd’hui la valeur de ses enseignements. Mais pour en tirer parti efficacement, il faut notamment pouvoir l’appliquer au cœur même de l’activité productive, c'est-à-dire dans les procédés industriels de conception et de fabrication.
 
L'innovation de procédé est donc une démarche de perfectionnement permanent des processus de production. Et ses déclinaisons sont aussi nombreuses qu'il existe d'entreprises !



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